au bord du train

Publié le par marie

Chaque soubresaut inattendu la fragilise un peu plus. Elle respire dans la profondeur de son ventre à chaque instant pour y puiser la force de rester à la surface, de garder la bouche et le nez hors de l’eau, pour continuer à respirer, ne pas sombrer étouffée dans les larmes. Ses yeux s’accrochent au regard de la grosse dame derrière son comptoir, se maintenir à flot dans le regard des vivants, un chien peut faire l’affaire. Maintenir la sensation de son existence dans la certitude inébranlable que ce regard la voit, lui parle, et ne remarque ni le processus en cours de son évaporation, ni sa peur paralysante, ni même, semble-t-il, les larmes qui baignent ses paupières. De même, constater qu’elle comprend chaque mot égrené dans le débit sourd et gris d’Europe 1 la ramène à la crête des flots lestés de la langueur de ce jour férié; aidée dans cette lutte de fond par le combat incessant qu’elle mène contre le pied bancal pour sauver l’équilibre instable du monde, tasse pleine de chocolat chaud, livre, et petite cuillère, mis en péril à chaque assaut de son poignet sur la feuille lisse.

Elle sort et le froid saisit d’un coup ses joues et sa vie.


Publié dans suite informe

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